logo journal infos-laurentides
icon journal
«En ouvrant la porte, on m’a planté une carabine 357 en pleine face» – Claude Poirier

Les négociateurs Claude Poirier et Robert La Haye.
Photo Société d’histoire de la Rivière-du-Nord – Fonds L’Écho du Nord

«En ouvrant la porte, on m’a planté une carabine 357 en pleine face» – Claude Poirier

Publié le 28/03/2018

Par Mathieu Locas

Encore à ce jour, la prise d’otages de Saint-Jérôme demeure la plus longue de l’histoire du milieu carcéral canadien. Claude Poirier s’en souvient comme si c’était hier.

«J’ai reçu un appel d’Edgar Roussel dans mon auto de reporter de CKVL pour me demander de m’en venir à Saint-Jérôme, parce que lui, Roland Simard et Lucien Jacques avaient capturé plusieurs otages. Ils demandaient 1 million de dollars dans un truck de la Brinks, des vestes par balles, des passeports et un avion en direction de l’Amérique du Sud. J’ai appelé l’avocat Robert La Haye. Il était chez le dentiste, la bouche gelée. Je lui ai dit: laisse faire ton dentiste, viens me retrouver à telle place sur l’autoroute et on va descendre à Saint-Jérôme avec une seule voiture.»

Ce que Claude Poirier n’avait pas prévu, c’était de passer presque les deux semaines suivantes à Saint-Jérôme. «En ouvrant la porte à la prison, on m’a planté une carabine 357 en pleine face. J’ai dit que ce n’est pas en sortant les guns qu’on va régler les affaires. Les trois mutins nous ont avertis qu’ils ne voulaient pas que ça se finisse comme l’affaire Marion (Charles Marion, gérant de crédit d’une caisse Desjardins de l’Estrie est enlevé à l’été 1977. La Sûreté du Québec avait remplacé des billets de banque par du carton, lors d’une tentative de remise de rançon)».

Les journées étaient longues et les nuits courtes. «On dormait une ou deux heures par nuit. Le ministre de la Justice de l’époque, Marc-André Bédard, était en congé de maladie. On devait négocier directement avec le premier ministre René Lévesque, qui était le procureur général par intérim. On est même descendus à Ottawa pour tenter d’impliquer le gouvernement fédéral.»

À un moment donné, Claude Poirier a senti que la direction de la Sûreté du Québec se servait de lui et Robert La Haye pour tenter de capturer les mutins. «On voyait que la SQ rentrait de l’équipement dans la prison. Puis à un moment donné, j’étais au téléphone avec un des mutins et la SQ nous demandait de les tenir en ligne pour faire du temps. En voyant ça, j’ai dit à La Haye: Awaye, on sort d’icitte. La SQ est en train de nous jouer dans le dos».

Claude Poirier et Robert La Haye se sont retirés à la treizième journée. Par la suite, les négociateurs de la police ont fait appel à Réal Brousseau, qui se trouvait dans une prison en Ontario, pour dénouer l’impasse.

Les mutins se sont rendus et tous les otages ont été libérés sans qu’il n’y ait de blessés.